Eric Fernez, D'Eugènie à Emilie, chef de l’année chez Gault & Millau

La belle nouvelle que voici ! Il y a deux ans, la seconde étoile donné par Michelin au chef D’Eugénie à Emilie avait été perçue comme la consécration d’une vie. La récompense octroyée hier par le Gault & Millau, culturellement marquée d’audace sur le coup, est une reconnaissance supplémentaire pour une cuisine de produits, simple, classique et gourmande. Pour le repas clôturant l'événement Gault & Millau, le chef de Baudour a sorti des fourneaux une fine brioche de pigeon, sauce Porto, avec chicon à l’orange. En live, en direct, envoyé devant plus de 600 personnes. Fallait oser… 

Restaurant Belgique Deugenie A Emilie Chef Eric Fernez1 Cici Olsson

Il y a cinq ans, à l’occasion de l’écriture de Mange Wallonie, j’avais découvert Eric Fernez et sa cuisine. Un beau personnage, entier, franc, confiant dans la cuisine de produits, simple, classique, mais jamais poussiéreuse. Grand connaisseur de ses classiques, Eric aime travailler des plats découverts chez ses confrères il y a parfois plus de dix, voire quinze ans.  Extrait de la rencontre, publié dans Mange Wallonie. « Aussi loin que je remonte dans mes souvenirs, je n’ai jamais pensé faire autre chose que cuisiner. Jamais. Je me rappelle d’un livre de la Guerre 14-18 où un poilu racontait qu’il n’aurait pas survécu dans les tranchées sans le souvenir de la soupe de sa grand-mère. Cela lui remontait le moral. Cela lui donnait du courage. Eh bien moi pareil. Le parfum de la soupe de ma grand-mère, je l’ai en moi depuis l’enfance, comme j’ai celui de sa terrine et de ses croustillons. Elle s’appelait Eugénie. Je lui dois ma passion du bien manger. J’étais chez elle tous les jours. A table, tous les midis. Il y avait l’entrée, la soupe et un plat. Chaque jour, un vrai repas.  Quand nous avons reçu notre première étoile, j’ai pensé à elle. Elle m’a appris à manger. Elle m’a appris à manger et à nager. Elle n’aimait pas son prénom. Elle aurait aimé s’appeler Emilie, le nom que nous avons donné à notre fille avec mon épouse… »

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« J’ai aussi appris la cuisine dans les grands restaurants. Comme client ! Les coquilles Saint-Jacques en demi deuil, je les ai découvertes chez Geert Van Hecke, au Karmeliet, il y a vingt ans. J’ai toujours été voir à droite à gauche ce que faisaient les grands chefs. Je regarde, je goûte, cela m’inspire, mais je ne copie jamais. Mon plat n’a rien à voir avec ce que j’ai vu. Ce n’est pas non plus de la relecture. Il y a juste l’émotion d’un souvenir. Le souvenir d’un plat… Voilà. Tu me demandais si ma première étoile avait changé ma vie. D’une certaine manière, oui, car elle amène du monde, pas mal d’habitués de grands restaurants. Cela fait plaisir. Ils se demandent un peu où ils tombent. Baudour ! Puis tu leur amènes ce genre d’assiette, des saint-jacques en demi-deuil, avec une lasagne de céleri, des topinambours et un jus de cochonnailles. Et tu leur cloues le bec. Gentiment !, mais tu leur cloues le bec quand même. »

Restaurant Belgique Deugenie A Emilie Plat Langoustine Embeurree Cici Olsson

« Le goût de la sobriété, je le dois à Alain Chapel. Un humaniste. Le chef qui s’efface devant le produit. Sa poularde de Bresse en vessie… Sa gelée de pigeon à l’anis étoilé… La première fois, chez lui, je n’avais pas vingt ans. On m’installe seul à une table, dans un coin. Je commence par un foie gras en terrine sur un consommé en gelée. Le foie gras, à l’époque, chez nous, on ne connaissait pas. Je n’en avais jamais vu. Je goûte… Une merveille ! Le meilleur foie gras de ma vie, servi à température idéale. Puis on m’a servi sa salade de homard bleu, gorge de pigeonneau et pourpier aux truffes. Tu entends l’intitulé ? Tu entends comme ça chante ? On me dit que la préparation est annoncée pour deux, mais ce n’est pas un problème. Je finis le plat, puis on me sert un agneau de lait entouré d’un cordon de moelle. Grandiose. »

Restaurant Belgique Deugenie A Emilie Plat Foie Gras Cici Olsson

« Les langoustines rôties à l’embeurrée de chou, c’est un plat dont je suis fier. C’est un classique de Paul Descamps, chef de La Fringale, à Blaregnies. Il a eu une étoile. De nouveau, cette recette, je l’ai reprise, adaptée, mais je respecte l’association de base entre la langoustine et le chou qui est surprenante. Evidemment, il te faut le produit. Ces langoustines sont arrivées ce matin de Bretagne. Ensuite la cuisson… Goûte ! C’est fragile, précis, délicat, mais basique de chez basique. Chez moi, quand ça paraît simple, c’est que c’est juste ! » Photos Cici Olsson. Il reste quelques Mange Wallonie. A vendre sur SH-opeditions.com

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